Matthias Giraud m’a fait peur…

Pour ce sixième épisode de Bon Appétit, j’ai de nouveau eu l’occasion de filmer avec Matthias Giraud un ski basejumper français exporté aux US depuis quelques années…

Matthias m’avait déjà parlé du Cervin depuis quelques mois, je sentais qu’après l’Eiger l’hiver dernier, il devait ajouter le mythique Matterhorn à son tableau de chasse !

Pour commencer nous mettons le cap sur Argentière où deux ski BASE « faciles » d’accès nous attendent ! Il y a moins de neige que prévu une des deux falaises est impraticable, Matthias décide de sauter 2 fois du même take off, lui permettant ainsi de lâcher les chevaux sur le second essai.. Filmiquement parlant très intéressant !

Tout se déroule comme prévu, même si l’accès au spot pour shooter est assez flippant! J’aime pas les glaciers… Mon petit frère a pu venir assurer un deuxième angle, il descend un peu en rappel depuis le take off, c’est du beau boulot jeune !

J’attends qu’un sérac tombe au milieu du glacier…

Après quelques heures bien stressantes, la pression tombe, Matthias a super bien géré ses deux sauts.. Tout est dans la boite ! Une petite heure de crapahutage dans la forêt et on retrouve la civilisation..

Deuxième étape du tournage et pas des moindres, le Matterhorn !

Matthias a confié l’organisation de la petite sauterie à Simon Anthamatten, le frère de Samuel qui a bien déchiré le FWT cette année ! Les 2 sont compagnons de cordée et ont déjà réalisé de belles premières !

Matthias dans le train, passage obligatoire pour ce rendre à Zermatt.

Simon décide que le vendredi 11 Mars est une belle fenêtre météo pour s’aventurer sur les pentes du Cervin.. Jeudi soir nous sommes à Zermatt pour les derniers préparatifs : 3 options s’offrent à nous, Matthias fini par choisir de sauter depuis le « triangle du Cervin »  à 4200m..

Le triangle du Cervin, un take off à 4200m…

7h, nous sommes à la DZ d’Air Zermatt, les techos s’acharnent sur les machines, notre Lama nous attend prêt pour une dépose un peu particulière.. Nous embarquons avec un pilote et un technicien qui s’occupera d’hélitreuiller Matthias et Simon.

Je sais que pour tout puriste de la montagne, monter sur le Cervin en hélicoptère n’a aucune valeur, mais dans la fenêtre météo imposée nous n’avions vraiment pas le temps de monter à pied. Une prochaine fois j’espère !

Il n’en reste pas moins que survoler cette montagne qui m’a toujours fait rêver est une bien belle expérience !

Une fois arrivée aux abords du triangle, on voit direct que ce ne sera pas un run facile, la face est parsemée de rock, Matthias pense tout de même que c’est possible en optant pour seulement 2 ou 3 virages avant le take off. La neige est  bien plaquée contre les rochers qui ont une bonne inclinaison, en skiant de manière « douce » c’est possible d’atteindre le plongeoir sans problême !

Dans l’hélico je suis tendu comme un arbalète, j’ai la boule au ventre depuis hier soir… A chaque fois que tu shootes de la wingsuit ou du BASE, il plane cette ambiance si particulière, mélange d’excitation et de peur… Tu sais que la moindre erreur se paye très chère, ce qui se passe dans ton oeilleton peut devenir dramatique. Pourtant tu es là et conscient des risques, c’est étrange…

Matthias est là, accroché à ce bout de montagne, une dernière pensée aux êtres qu’il aime, il lève le bras, j’appuie sur le bouton rouge, un signe au pilote et c’est parti..

D’ailleurs cette fois, j’ai beau avertir le pilote du départ, il ne bronche pas, occupé à parler un merveilleux suisse allemand avec son collègue… 2 secondes plus tard Matthias arrive déjà sur le take off, c’est là qu’il enfonce le manche, le Lama plonge dans la face nord, le mouvement de l’appareil m’empêche de bien cadrer pendant la seconde où le début d’un drame se passe.. Quand Matthias réapparait net dans mon viseur, il tombe dans l’ombre de la face nord, le parachute sort, la voile blanche se déploie, pour moi tout a bien marché… C’est alors que je remarque qu’il lui manque un ski, le pilote me lance un « Holy Shiiiiiiit, he wasn’t safe »… Nous remontons chercher Simon qui est toujours accroché sur l’arrête, c’est là qu’il me montre la petite vidéo qu’il a filmé depuis le bord.. Là je prends pleinement conscience de ce que Matthias vient de faire… C’est hallucinant, il a vraiment eu chaud !

Nous descendons chercher Matthias qui s’est tranquillement posé, les premières paroles qu’il m’adresse sont « j’y crois pas.. je suis en vie »…  Il continue par m’expliquer comment son ski a été arraché par un petit rocher caché derrière ce qu’il pensait être un bon take off, comment il a pu éviter que son ski se prenne dans les suspentes.. Ce sont des moments très forts, tout le monde se regarde, se prend dans les bras, on ne peut l’expliquer.

Tout est allé très vite et un mélange d’expérience et de chance a fait que Matthias s’en est tiré.. Il n’y a pas à théoriser pendant des heures, en ski BASE le nombre de paramètres qui entre en jeu est énorme, c’est après 225 sauts que l’un d’entre eux est venu rappeler Matthias à l’ordre, comme il dit lui même : « En un saut, j’ai pris 10 ans d’expérience ».

Je vous laisse en juger par vous même, les images ne mentent pas :

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